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École normale supérieure

     
Articles

« William James et Charles Renouvier. Liberté, phénoménisme et vampirisme philosophique »

Chine France – Europe Asie. Itinéraire de concepts, sous la direction de Michel Espagne et Li Hongtu, Paris, Editions rue d’Ulm, 2018, 445-458.

La relation à double sens entre James et Renouvier est un fait censément bien balisé dans l’histoire de la philosophie. On connaît, depuis sa publication par Perry , le passage du journal intime de James en 1870, où il consigne la révélation que fut pour lui la philosophie de la liberté de Renouvier : ayant lu le philosophe français au plus fort d’une crise philosophique, James nous dit qu’il a choisi de suivre son exemple, et de « croire à la liberté », ce qui allait ouvrir la voie à l’ensemble des essais rassemblés quelque vingt-cinq ans plus tard dans La Volonté de croire. On sait également que la revue philosophique de Renouvier, La Critique philosophique, a accueilli et traduit l’un des tout premiers articles de James en 1878. Ces points sont connus… peut-être trop connus, car ils semblent avoir découragé des enquêtes plus poussées sur les relations philosophiques entre les deux hommes, entre le « vieux lion », au fait de sa gloire, et le jeune James, de vingt-sept ans son cadet, en un moment décisif de sa formation philosophique .
Il n’y a en effet, étonnamment, que très peu d’études sur ce thème, et celles qui sont détaillées portent en général sur un aspect de la doctrine de la volonté de croire , alors même que la Critique philosophique regorge de références à James sur différents sujets, que la correspondance entre les deux hommes a été éditée et traduite dès 1929 et que de nombreux textes de James, au moment où éclate la « querelle du pragmatisme », après 1904, ne furent d’abord disponibles que sous cette forme. C’est à l’éclairage de cette relation singulière que ce texte sera consacré : que représentent Renouvier et sa revue pour James ? Et surtout, puisqu’il s’agit d’une « lecture » de la philosophie américaine : quel intérêt le jeune James, qui n’avait encore rien publié, pouvait bien représenter pour Renouvier, pourquoi cet intérêt pour la philosophie américaine dans les colonnes d’une publication néo-kantienne ?