Ce livre présente l’édition et la traduction annotée de fragments issus d’un traité doxographique de maqâlât d’al-Qalânisî datant de la fin du IIIe/IXe ou début du IVe/Xe s. À la différence d’al-Balkhî et d’al-Ashʿarî, les deux grands auteurs de maqâlât de cette époque, notre auteur n’est ni muʿtazilite ni formé à l’école des muʿtazilites, mais un théologien de l’école d’Ibn Kullâb. À l’instar de ce dernier, il entreprend de défendre les doctrines sunnites selon la méthode dialectique. Seuls fragments restants de ce grand théologien méconnu qui a fait toute sa carrière à Rayy, ces maqâlât reflètent son projet intellectuel d’intégrer la réflexion des milieux traditionnistes dans les grands débats théologiques du IIIe/IXe s. L’histoire qu’il nous livre des premiers siècles du kalâm prend ainsi le contrepied aussi bien de celle des muʿtazilites que de celle des hanbalites, pour qui les métiers de théologiens et de traditionnistes s’opposent et s’excluent mutuellement. À travers la catégorie de « théologiens traditionnistes » qui apparaît pour la première fois dans nos fragments, al-Qalânisî participe avec al-Ashʿarî de ce grand mouvement de synthèse qui caractérise le IVe/Xe s. Toutefois, malgré des similitudes doctrinales qui les rapprochent, les deux projets historiographiques diffèrent fondamentalement l’un de l’autre. L’étude qui précède l’édition apporte un nouvel éclairage sur de ce dernier représentant du kullâbisme qu’était al-Qalânisî – permettant par là d’expliquer les raisons du succès d’al-Ashʿarî, dont l’école reléguera aux marges de l’orthodoxie cette première efflorescence du kalâm sunnite.