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École normale supérieure

     
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« L’égalité politique et les limites de la démocratie procédurale »

Philosophiques, vol. 46, n°1, printemps 2019, 29-44.

Tout le monde semble s’accorder pour penser la démocratie comme le régime de l’égalité politique. Mais les divergences sont nombreuses dès qu’on s’interroge sur le contenu de cette égalité et sur les raisons qu’on peut invoquer pour la justifier.
Deux types d’arguments semblent s’opposer sur ce point. On peut considérer, comme R. Dahl par exemple, que l’égalité politique est requise afin que la désignation des gouvernants par la voie électorale puisse paraître légitime et qu’elle ne soit pas contestée. L’argument est alors procédural. On peut également considérer, comme T. Nagel par exemple, que cette justification est insuffisante parce qu’elle est extérieure à l’idée démocratique, et que si celle- ci implique que tous aient le même statut politique, c’est parce qu’elle est le régime général de l’égalité, et que l’égalité politique en est la première forme. L’argument est alors substantiel.
L’objet de cet article est double. Il s’agit d’une part de comprendre ce que les défenseurs d’une conception substantielle de la démocratie reprochent à ceux qui définissent celle- ci en termes procéduraux. Il s’agit d’autre part de se demander s’il est possible de s’en tenir à une justification seulement procédurale de l’égalité politique, et en conséquence de s’interroger sur l’interprétation que l’on doit en avoir.

Democracy is usually seen as the regime of political equality. But there are many differences about the content of this equality and the reasons that can be invoked to justify it.
Two types of arguments seem to be opposed on this point. One can consider, as R. Dahl for example, that political equality is required so that the election of the leaders can appear legitimate and not disputed. The argument is then procedural. One can also consider, as T. Nagel for example, that this justification is insufficient because it is external to the democratic idea, and that if this implies that all have the same political status, it is because democracy is the general system of equality, and political equality is its first form. The argument is then substantial.
The aim of this article is twofold. First, I try to understand why the defenders of a substantial conception of democracy blame those who define it in procedural terms. Next, I try to understand the reason why the procedural justification of political equality could be irrelevant, and must be completed by substantial arguments.

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