Signes, Symboles, Métaphores. Le structuralisme et ses réponses (Lévi-Strauss, Ricoeur, Derrida) – Giuseppe AL MAJALI et Tristan BARBEROUSSE
S1 – Mardi 8h30-10h30 – Résistants
Ce cours vise l’exploration de la pensée symbolique à travers un débat crucial pour la pensée française d’après-guerre.
La première partie reconstruira le sens et les modalités de la pensée symbolique dans le structuralisme. Nous nous concentrerons sur des textes de Claude Lévi-Strauss, qui fait de la production symbolique, l’objet premier du renouvellement sémiologique des sciences sociales et l’activité capable de lier entre elles les discontinuités propres à l’organisation sociale d’un côté et aux nécessités biologiques de l’autre (Nature et Culture). Nous analyserons la pensée symbolique chez C. Lévi-Strauss, les valeurs qu’il assigne respectivement à la métaphore et à la métonymie. On puisera d’abord dans le corpus linguistique qui inspire la naissance du structuralisme (F. de Saussure et R. Jakobson), ensuite nous analyserons les textes lévi-straussiens centrés sur cette question, pour enfin en mesurer les conséquences chez d’autres auteurs fidèles à la méthode structuraliste (tels que J. Lacan ou G. Deleuze).
La seconde partie du cours s’intéressera à l’idée selon laquelle la conception structuraliste de la métaphore reposerait sur une conception métaphorique du structuralisme, ou, dit autrement, sur une métaphore à la base de la théorie même du structuralisme (J.-B. Renault). Tout d’abord, nous étudierons plus en détail la théorie que le structuralisme fait de la métaphore. Puis nous examinerons la métaphore clef du structuralisme, celle de la langue « comme économie ». En effet, dès le départ, F. de Saussure a théorisé la langue d’après la « valeur d’échange », tandis que C. Lévi-Strauss a fini par l’élever au rang d’« infrastructure ». Enfin, nous prendrons plus de recul en restituant deux grandes critiques complémentaires du structuralisme, celles de P. Ricoeur et de J. Derrida. D’une part, la critique de P. Ricoeur est plutôt « externe » : faisant signe vers ce que la structure ignore et même obstrue : le sujet historique, la signification consciente ou encore l’événement de parole. D’autre part, la critique de J. Derrida est plutôt « interne » : déconstruisant le concept même de « structure », ou déjouant son ambition en révélant sa « différance » par le biais d’une interrogation sur l’écriture. Ces deux critiques reposent en fait sur des conceptions opposées du langage que nous tenterons d’exposer.
Séminaire doctoral – Groupe de lecture en métaphysique et histoire de la philosophie – Jean-Pascal ANFRAY
S1 – Mardi 16h-18h - Pasteur
Ce séminaire est conçu comme un groupe de lecture à l’adresse des doctorants et mastériens. Les années précédentes, chaque séance consistait dans la présentation par un des participants d’un article ou chapitre, d’un ouvrage, classique ou récent, relevant tantôt de l’histoire de la philosophie moderne, tantôt de la métaphysique contemporaine.
Cette année, le format sera légèrement différent, il s’agira de présenter les étapes de la traduction du recueil de David Lewis, Papers in Metaphysics and Epistemology (Cambridge UP, 1999).
Le séminaire peut être validé dans le cadre du DENS ou du master, sous condition d’assiduité à l’ensemble des séances et de participation à l’une d’elles ou, éventuellement, d’un mini-mémoire.
Le séminaire est en français ; les validations écrites peuvent être en anglais.
Séminaire Mathesis – Jean-Pascal ANFRAY, Alexis ANNE-BRAUN, Elena PARTENE, Sophie ROUX
Annuel – Mercredi 16h30-18h30 – Salle de séminaire Cavaillès de la République des savoirs, 29 rue d’Ulm, 3e étage
Du 17/09/25 au 06/05/26
Le Séminaire Mathesis est un séminaire d’équipe qui est l’occasion, pour les membres de l’équipe Mathesis de la République des savoirs, enseignants-chercheurs aussi bien que doctorants, de présenter leurs travaux, de discuter d’articles importants et d’écouter des collègues de passage à Paris.
Étant donné ce que sont les recherches des membres de Mathesis, les travaux présentés dans ce séminaire relèvent principalement, mais pas exclusivement, de l’histoire de la philosophie moderne et de l’histoire et de la philosophie des sciences.
Les séances sont consacrées à discuter des travaux en cours, sous la forme d’un article ou d’un chapitre envoyé quelques jours à l’avance aux participants.
Le Séminaire Mathesis a lieu tout au long de l’année à raison d’environ une séance toutes les deux semaines. Il est ouvert à tous et à toutes. Il est validable sur l’année par les mastériens et les normaliens, mais il est également possible de venir de manière « libre », sans validation. Dans l’un et l’autre cas, il est recommandé de prévenir les organisateurs pour que ceux-ci puissent vous envoyer le chapitre ou l’article qui doit être discuté.
L’art en action et l’art comme action – Alexis ANNE-BRAUN
S1 – Mardi 16h-18h – Résistants
L’histoire de l’art des cinquante dernières années a rendu suspecte l’idée que l’œuvre d’art devait être pensée sous la catégorie de l’objet matériel. Dans son texte-manifeste Art as Life, Allan Kaprow, s’inspirant du geste inaugural de Jackson Pollock, proposait de remplacer la peinture par les happenings. L’historienne de l’art, Lucy Lippard fera le constat quelques années plus tard d’une « dématérialisation de l’art » dans les pratiques artistiques les plus avancées. Dans les années 90, le critique d’art, Nicolas Bourriaud, redéfinira l’œuvre du point de vue des relations de sociabilité qu’elle instaure avec un public. Ces propositions artistiques et critiques ont produit des effets dans les institutions mais aussi dans la philosophie de l’art. Plutôt que de vouloir déterminer une essence de l’art, Nelson Goodman a par exemple proposé une théorie pragmatiste de l’art, qui accorde priorité à la question « Quand y a-t-il art ? » et qui invite à réfléchir aux moyens dont disposent les institutions pour activer les œuvres, c’est-à-dire pour les mettre en marche. Enfin, dans le champ de l’ontologie de l’œuvre d’art, le philosophe David Davies a avancé l’idée que ce qui détermine l’identité de l’œuvre est l’action ou la performance de l’artiste qui génère l’œuvre, plutôt que le produit fini.
Ce cours se propose de suivre cette piste de « l’art comme action », dans ses différentes acceptions et enjeux (historiques, esthétiques, épistémologiques et ontologiques). Il ne suppose aucun prérequis en philosophie ou en histoire de l’art.
Bibliographie (indicative et qui sera complétée en début de semestre) :
David Davies, Art as performance, Wiley-Blackwell, 2004.
David Davies, Philosophy of performing act, Wiley-Blackwell, 2012
John Dewey, L’art comme expérience, Paris, Gallimard-folio, 2010, chapitre 1, 2, 3.
Nelson Goodman, L’art en théorie et en action, Paris, Gallimard-folio, 2009.
Richard Schechner, Performance. Expérimentation et théorie du théâtre aux USA, Éditions théâtres, 2008 (Partie 1).
Introduction à la philosophie de l’esprit – Margherita ARCANGELI et Jérôme DOKIC
S1- Vendredi 14h-16h – Salle à venir
Calendrier spécifique : Du 10/10 au 30/01
L’esprit et le mental sont des thèmes historiquement chers aux philosophes. Différentes écoles de pensée, à l’instar de la phénoménologie, de l’existentialisme et de la philosophie analytique, ont contribué à façonner la philosophie de l’esprit, aujourd’hui également alimentée par les recherches empiriques menées en sciences cognitives. Le problème central de la philosophie de l’esprit est le problème corps-esprit : comment l’esprit se relie-t-il au corps physique ou biologique ? La compréhension de la nature de cette relation s’avère fondamentale pour aborder des questions philosophiques majeures, concernant le critère du mental, la nature de la personne et de sa relation à l’environnement et à autrui, ou encore la distinction entre les humains et les animaux ou autres agents non humains du point de vue de leurs capacités mentales.
Ce cours a pour objectif de permettre aux étudiants de se familiariser avec la philosophie de l’esprit contemporaine en leur fournissant les concepts techniques de base et en analysant les questions centrales relatives à la nature de l’esprit. Chaque séance sera consacrée à la discussion d’une question spécifique à travers l’analyse d’un texte.
Possible, puissance, pouvoir : de l’ontologie au politique - Gwenaëlle AUBRY
S2 – Vendredi 16h-18h – Résistants
Calendrier spécifique : 23/01, 13/02, 13/03, 10/04, 22/05
Ce séminaire s’assigne un double objectif, à la fois généalogique et critique : on commencera par étudier les principaux lieux d’élaboration antiques et médiévaux des concepts de possible, de puissance et de pouvoir, de façon à délimiter leur contenu propre mais aussi à analyser les différentes relations qui les organisent. On s’intéressera ainsi à la démarcation entre les concepts aristotéliciens de dunaton, dunamis et dunamei, aux théories néoplatoniciennes du principe (arkhè), à la théologie de la toute-puissance et aux redistributions conflictuelles qu’elle engage entre ces trois notions. Plutôt qu’à reconstituer une histoire polyphonique, on s’attachera à dégager des modèles conceptuels en même temps que des moments ontologiques distincts.
Dans un second temps, qui prendra la forme d’un cycle de conférences, on s’interrogera sur les figures politiques – y compris modernes– dérivables de ces modèles, mais aussi sur les limites d’une telle dérivation du politique à partir de l’ontologie.
De ce double parcours on attend, à terme, qu’il contribue à éclairer les usages contemporains de ces notions, fortement polarisés entre la réduction du possible à la capacité passive, voire à l’impuissance, et la recherche de tendances immanentes à même de le redéployer.
Ce séminaire (5 séances) est validable dans le cadre du DENS (mini-mémoire). Il l’est également dans le cadre du Master de philosophie à condition que soit aussi suivi le séminaire « Y a-t-il une politique néoplatonicienne ? » co-organisé par G. Aubry, D. El Murr, J. Giovacchini et J. Lemaire
Y a-t-il une politique néoplatonicienne ? – Gwenaëlle AUBRY, Dimitri EL MURR, Julie GIOVACCHINI et Juliette LEMAIRE
S2 – Vendredi 16h-18h – Résistants
Calendrier spécifique : A venir
Ce séminaire se propose d’enquêter sur l’un des aspects les plus énigmatiques du néoplatonisme, à savoir l’absence en son sein d’une philosophie politique identifiable et constituée. Ceux que l’historiographie moderne appelle « néoplatoniciens » se revendiquant comme des « platoniciens », comment comprendre qu’ils n’aient pas accordé au politique la fonction centrale que lui attribue Platon ? Si des reconstructions de la « philosophie politique néoplatonicienne » ont néanmoins été tentées, nous souhaiterions pour notre part poser la question à nouveaux frais, d’abord en en définissant les termes : y a-t-il place, dans le néoplatonisme, pour une politique distincte de l’éthique ? Et à supposer qu’une telle politique puisse être dégagée, en quoi est-elle néoplatonicienne et non pas simplement platonicienne ? Dans quelle mesure est-elle indexée sur la structure métaphysique propre au néoplatonisme ?
Plus que les éléments factuels d’une reconstruction, ce sont des conditions de possibilité que nous interrogerons, de façon aussi à faire droit, en lisant les textes, à la diversité des néoplatonismes.
Pour cette deuxième année du séminaire, nous consacrerons quatre séances à quatre figures majeures du néoplatonisme après Plotin (Porphyre, Jamblique, Proclus et Julien l’Empereur) au sujet desquels nous solliciterons quatre spécialistes internationaux du néoplatonisme.
Ce séminaire (4 séances) est validable dans le cadre du DENS (mini-mémoire). Il est possible de le valider dans le cadre du Master de philosophie mais uniquement en suivant également l’intégralité du séminaire de G. Aubry, « Possible, puissance, pouvoir ».
L’Éthique d’Aristote – Jonathan BARNES
Annuel – Mardi 10h30-12h30 – Salle de séminaire du DSA
Calendrier spécifique : 23/09, 7-21/10, 18/11, 2-16/12 2025, 20/01, 3-17/02, 10-24/03, 07/04 2026
Après une introduction aux textes aristotéliciens, ainsi qu’à leur arrière-plan historico-philologique, on examinera la prise de position d’Aristote par rapport aux questions suivantes :
1 Qu’est-ce que l’eudaimonie, ou le bonheur, qui est, selon Aristote, le but ultime de toute action humaine ?
2. Le ‘bien de l’homme’, existe-t-il ? et si oui, quelle est sa relation à la vertu ?
3 Le sens du mot ‘aretê’ ou ‘vertu’ : la vertu comme ‘moyen terme’ ou ‘médiété’.
4 Le volontaire, la délibération, la ‘vérité pratique, …, et le libre arbitre ?
5 A propos des vertus dites ‘morales’, et surtout à propos du courage.
6 La justice, et ses espèces.
7 A propos des vertus dites ‘intellectuelles’, et surtout à propos de la phronêsis ou de la prudence.
8 L’acrasie : comment peut-on faire quelque-chose tout en croyant qu’il ne faut pas le faire ?
9, Le plaisir, sa nature et ses espèces. (Et y a-t-il vraiment deux discussions séparées dans l’Éthique à Nicomaque ?)
10 Qu’est-ce que l’amitié selon Aristote ? (Et pourquoi a-t-il consacré deux fois plus d’espace à l’amitié qu’à tout autre sujet ?)
11 Et enfin : comment faut-il vivre dans le monde ?
Textes grecs :
Éthique à Nicomaque : I.Bywater (Oxford Classical Texts)
Éthique à Eudème : C.J. Rowe (Oxford Classical Texts)
Traductions françaises :
Éthique à Nicomaque : J. Tricot (Paris, Vrin, nombreuses rééditions)
Éthique à Eudème : V.Décarie (Paris, Vrin, 1978)
Séminaire platonicien et néoplatonicien : sur le Philèbe - Luc BRISSON, Pierre CAYE, Philippe HOFFMANN
Annuel – Lundi 16h-18h - Pasteur
Calendrier spécifique : 06-13/10, 10-17/11, 01-08-15/12 2025, 05-12-19-26/01, 02-09-16/02, 09-16-23-30/03, 04-11-18/05 2026
Nous aborderons cette année l’étude du Philèbe. La vie bonne est-elle une vie de plaisir ? se demande le Philèbe La question est bien étrange sous la plume d’un Platon qui n’a jamais fait mystère de son opposition aux plaisirs, notamment dans le Gorgias. Ce dialogue, qui doit refléter un débat, alors en cours dans l’Académie, apporte une réponse inattendue ; à qui sait reconnaître la mesure et l’appliquer aucun plaisir n’est interdit, et qui montre que pour Platon l’homme en ce monde ne doit pas s’interdire toute jouissance corporelle, mais la maîtriser en la subordonnant à la destinée de son âme. Les néoplatoniciens, pour leur part, tiendront ce dialogue pour l’un des sommets du Platonisme, parce qu’il évoque la Limite et l’Illimité qui, se situant tout juste au-dessous de l’Un dans l’échelle de la réalité, constituent les deux principes du mélange dont résulte tout le reste. C’est sur ce dernière thème de la limite et de l’infini que se consacrera le second semestre du séminaire, en insistant sur les ambiguïtés qui traversent la notion d’infini à travers l’histoire de la métaphysique.
Fondements représentationnels de l’esprit (Core analytic/Fondements analytiques) – Denis BUEHLER
S1 – Jeudi 14h-16h - DEC
Première séance : 23 septembre.
TD les mercredis 14h-16h - Salle à venir
This course aims to (i) provide the conceptual foundation for and (ii) introduce students to core debates in philosophy of cognitive science.
Prerequisites : None
ECTS : 6 (for students from the department of Philosophy who take the accompanying TD)
Language : English and/or french
Ce cours vise à (i) fournir les bases conceptuelles et (ii) initier les étudiants aux débats fondamentaux en philosophie des sciences cognitives.
Prérequis : Aucun
ECTS : 6 (pour les étudiants du département de Philosophie qui suivent le TD d’accompagnement)
Langue : anglais et/ou français
Reference and meaning (Core analytic/fondements analytiques) – Denis BUEHLER
S1 – Mardi 14h-17h – Salle des Actes
Première séance : 23/09/2024
Foundational debates concerning reference and meaning in language and mind : Frege, Russell, Logical Empiricism, Quine, Donnellan, Kripke, Kaplan, Putnam, and Burge.
Prerequisites : None
ECTS : 6
Language : English and/or french
Débats fondamentaux concernant la référence et la signification dans le langage et l’esprit : Frege, Russell, l’empirisme logique, Quine, Donnellan, Kripke, Kaplan, Putnam et Burge.
Pré-requis : Aucun
ECTS : 6
Langue : anglais et/ou français
First year seminar : current topics in analytic philosophy - Denis BUEHLER
Annuel / Level : PhD / ECTS : 6 / Number of hours : 36h
Prerequisites : this year-long seminar targets doctoral students in their first year, specializing in analytic philosophy. More advanced doctoral students are, however, also very welcome.
The seminar discusses current contributions in analytic philosophy. It focuses on training oral and written engagement with those contributions.
If you’d like to participate, please send an email to denis.buehler@ens.fr by September 15th.
Course taught in : English and/or French
Writing for philosophy – Denis BUEHLER
S2 – Vendredi 10h30-12h30 – DEC
Level : First year (M1) / ECTS : 6 / Number of hours:36h
Prerequisites : (ideally) introductory course in logic ; restricted to students who declare philosophy as their major ; maximal enrollment 6 students.
If you wish to participate, please send an email to denis.buehler@ens.fr by January 15th.
Course taught in : English
This course aims to provide hands-on training in philosophical writing and argument-analysis skills for students who have decided to specialize in philosophy. The aim is to learn how to write a US-style term paper.
Anthropologie et philosophie après 1945 (V) - F. BURGAT, J.-Cl. MONOD, Chr. SOMMER
S2 – Vendredi 10h30-12h30 – Pasteur
Calendrier spécifique : 23-30/01, 06-13-20/02, 13-20-27/03, 10/04, 17/04, 22-29/05
Ce séminaire collectif de recherche entend reconstruire la constellation de certaines problématiques et débats noués à des points de croisement ou de tension entre anthropologie et philosophie après 1945. Pour sa cinquième année, le séminaire traitera de l’anthropologie psychanalytique (Róheim, Ferenzci), de l’anthropologie des images (Lévi-Strauss, Descola) et de la philosophie des institutions (Gehlen, Blumenberg) à la lumière du « tournant ontologique » de l’anthropologie (Descola, Viveiros de Castro).
Séminaire Art, Technique, Production – Pierre CAYE
Annuel – Vendredi 17h-19h – Pasteur
Calendrier spécifique : 10/10, 14/11, 12/12, 16/01, 13/02, 13/03, 10/04, 22/05
L’être est production, l’ontologie pensée de la productivité. La productivité de l’être joue un rôle central dans la constitution du monde moderne. Elle rend raison de notre rapport au réel, que celui-ci soit technique, économique, poétique ou artistique. Mais en tant que tel l’être est affecté d’entropie. La production n’assure pas sa reproduction. C’est toute la question du développement durable.
Depuis 3 ans le séminaire interroge ces questions à travers la critique de l’économie politique telle que Marx l’a posée dans le Capital et dans ses textes préparatoires. Après avoir montré combien cette critique insiste sur l’entropie du capital et sur l’épuisement des facteurs de production, nous conclurons ce cycle triennal par une triple question :
_ Existe-t-il une partie positivée de la critique, c’est-à-dire une possibilité de définir ce que pourrait être une économie politique néguentropique alors que Marx n’a laissé que peu d’indices sur ce qu’il fallait faire pour substituer un système productif positif à la place du capitalisme ?
_ Nous traiterons aussi des rapports du Capital à l’écologie à la suite des travaux de James O’ Connor, John Bellamy Forster et plus récemment de Kohei Saito
_ Nous conclurons par une reconsidération des rapports de Marx à la philosophie dans la perspective de sa lutte contre l’épuisement de l’être.
Lectures lévinassiennes. Une autre voie phénoménologique - Thème : « Visage(s) : Questions phénoménologiques, anthropologiques et politiques. » – Danielle COHEN-LEVINAS
S1 – Mardi 14h-16h - Pasteur
Intervenants : Rodolphe Calin, Danielle Cohen-Levinas, Gérard Bensussan, Perrine Simon-Nahum, Panu-Matti Pöykkö, Raphael Zagury-Orly et Marie-Aude Baronian, Magdalene Thomassen, Charles Bobant, Pierre-Alban Gutkin-Guinfolleau, Viktoras Bachmetjevas, Vivian Liska.
Le séminaire de recherche et de master propose cette année d’approfondir un thème fondateur de la philosophie d’Emmanuel Levinas : le visage. Cette question, pour autant qu’elle structure le rapport à l’extériorité et à l’altérité, permet d’interroger à nouveau frais la tradition philosophique, en particulier phénoménologique. Le visage constitue chez Levinas un point limite, voire le moment névralgique de défection de la phénoménologie elle-même. La relation à autrui n’est ni donnée ni déduite, encore moins est-elle imposée. Autrui n’est ni subordonné à l’être, ni objet de représentation revendiquant son emprise sur l’Autre. Or, pour Levinas, comme nous avons pu l’étudier les années précédentes, l’intentionnalité husserlienne manque autrui comme tel. De même, chez Husserl, c’est l’ego qui donne sens et signification à autrui, alors que chez Levinas, le sens n’est pas donné et la raison n’est pas définie à l’avance. Autrui apparait comme « épiphanie du visage », à savoir comme ce qui précisément ne saurait se réduire à l’ordre de la phénoménalité. Du point de vue philosophique, cela signifie que le visage, qui s’impose à notre subjectivité, est déjà langage, appel, dont la première parole est un impératif éthique, le commandement biblique : « Tu ne tueras pas ». C’est par conséquent par le visage, exposé à sa pleine vulnérabilité, que Levinas engage une réflexion sur l’énigme du sensible, voire sur l’intrigue qui se noue entre la verbalité de l’être et l’expérience sensible, au point que par son visage, c’est toute l’humanité qui est sollicitée, dépassant ainsi l’idée de l’autre en moi. Le concept de visage chez Levinas n’est pas sans soulever également des question politiques, sans compter la question de l’animal : hormis l’humanité de l’homme, l’animal, a-t-il un visage ?
Nous étudierons la manière dont Levinas multiplie les approches du visage en conservant une tension et une ambivalence entre phénomène et non phénomène, présence dans et de l’être l’être et un au-delà ou un autrement qu’être.
« Visage, déjà langage avant les mots, langage originel du visage humain dépouillé de la contenance qu’il se donne – ou qu’il suppose – sous les noms propres, les titres, les genres du monde. (Levinas, Entre nous, 1993, p.233).
Lecture de G. Deleuze, Différence et répétition – Jules COLMART
S1 – Jeudi 8h30-10h30 - Résistants
“Le temps approche où il ne sera guère possible d’écrire un livre de philosophie comme on en fait depuis si longtemps” (p.4). Par la publication en 1968 de sa thèse Différence et répétition, Gilles Deleuze orchestre aussi bien sa pleine entrée en philosophie que le renversement de tout ce qui s’est fait traditionnellement jusqu’ici. Il s’agit ici aussi bien du dernier livre d’histoire de la philosophie que première tentative de dramatiser celle-ci dans le sillage de Nietzsche et par l’intégration des développements contemporains du structuralisme, des sciences et de la littérature. Différence et répétition, d’abord conçu comme une critique de la philosophie de la représentation parachevée par Hegel, peut aussi se lire comme la première tentative d’agencer un tout nouveau paysage pour la philosophie, autour d’une approche intensive, singulière et impersonnelle de l’être du sensible : “la plus folle création de concepts qu’on ait jamais vue ou entendue.” (p.3). Conçu comme un coup de tonnerre, un livre aussi ambitieux que complexe n’est toutefois pas exempt de tensions et de problèmes que Deleuze ne résoudra qu’ultérieurement.
Le déroulé du cours consistera en une lecture suivie de Différence et répétition. Deux axes nous guideront : quelle est la nouvelle ontologie proposée par Deleuze et comment s’inscrit-elle dans l’histoire de la philosophie ? Comment propose-t-il une nouvelle “image de la pensée”, une nouvelle façon de faire de la philosophie ? Cette lecture sera l’occasion de présenter l’œuvre d’historien de la philosophie de Deleuze avant 1968, tout en faisant signe vers les développements futurs de sa pensée. Des références à Logique du sens seront donc aussi faites si nécessaire pour faciliter la compréhension de certains passages de l’ouvrage.
Une connaissance préalable de Deleuze n’est pas nécessaire pour suivre ce cours. Les élèves intéressés peuvent, pour se préparer, lire Nietzsche et la philosophie (1962) et Proust et les signes (1964).
Ut pictura poesis ? : introduction aux débats esthétiques autour du mot et de l’image – Jules COLMART
S1 – Jeudi 16h-18h - Résistants
Que voulons-nous dire lorsque nous assimilons l’art à un langage ? À quelles conditions les images produisent-elles un sens ? Faut-il prendre au mot l’expression ut pictura poesis qui régit la théorie de l’art occidental depuis l’Antiquité ? Ou au contraire prendre acte d’une différence insurmontable entre le visible et le lisible ? Mais alors comment dire cette différence et le sens qui échappe au langage ? L’objet de ce cours est d’introduire à un des problèmes structurants de l’esthétique, à savoir celui de la relation entre le mot et l’image. Notre approche sera à la fois chronologique et thématique. Chronologique, car nous partirons des termes classiques du débat tels que posés dans l’Antiquité par Platon et Aristote, puis par Horace dans son Art poétique, ensuite par les Pères de l’Église, notamment au moment de la querelle iconoclaste, avant de nous déplacer vers la redéfinition de la relation texte-image à la Renaissance. La scène aura été dressée pour traiter de trois grands moments du débat qui fut au fondement de la constitution d’une science de l’art autonome : au XVIIIe siècle, la réponse de Lessing à Winckelmann dans son Laocoon, l’invention d’une Kunswissenschaft comme iconologie par Warburg et Panofsky au début du XXe siècle et, enfin, les multiples dépassements du paradigme de la lisibilité des images à partir des années 1970, avec la question d’une sémiologie de l’art en France (Louis Marin, Hubert Damisch) et sa critique (Georges Didi-Huberman), de la Bildwissenschaft en Allemagne (Gottfried Boehm) et de l’émergence des visual studies aux États-Unis (W. J. T. Mitchell). Tout au long de ce parcours historique, nous nous poserons deux questions : 1) Une question ontologique : qu’est-ce qui distingue une image d’un discours ? 2) Une question icono-logique : comment parler des images ?
Bibliographie indicative :
S. Alpers, L’Art de dépeindre. La peinture hollandaise au XVIIe siècle, trad. J. Chavy, Paris, Gallimard, 1990.
G. Boehm, (dir.), Was ist ein Bild ?, 2006.
J. Damascène, Discours apologétiques contre ceux qui rejettent les images saintes.
H. Damisch, L’Origine de la perspective, Paris, Flammarion, 1987, 2011.
G. Didi-Huberman, Devant l’image, Paris, Minuit, 1990.
M. Foucault, “Les mots et les images” [1967], in Dits et écrits, t.1, Paris, Gallimard, 2001.
Horace, Art poétique.
G. E. Lessing, Laocoon, ou des limites respectives de la poésie et de la peinture, trad. F. Teinturier, Paris, Klincksieck, 2011.
L. Marin, Détruire la peinture, Paris, Flammarion, 1977.
W. J. T. Mitchell, Iconologie. Image, texte, idéologie, trad. M. Boidy et S. Roth, Paris, Les Prairies Ordinaires, 2009.
E. Panofsky, L’œuvre d’art et ses significations, trad. B. et M. Teyssèdre, Paris, Gallimard, 1969, 2014 ; Essais d’iconologie, trad. C. Herbette et B. Teyssèdre, Paris, Gallimard, 1967, 2021.
Platon, La République, trad. G. Leroux, Paris, GF, 2016 ; Le Sophiste, trad. N. Cordero, Paris, GF, 2006.
M. Schapiro, Style, artiste et société, trad. coll., Paris, Gallimard, 1983, 1990.
La trace et l’archive. Parcours croisés dans la philosophie de l’histoire de Michel Foucault et Jacques Derrida – Jules COLMART
S2 - Jeudi 14h-16h - Résistants
L’objectif de ce cours est d’introduire à deux renouvellements importants de la question de l’histoire en philosophie française, par Foucault et Derrida. Partis tous les deux d’une lecture critique de Hegel, de Husserl et de Heidegger, ils élaborent chacun à leur façon une redéfinition de la philosophie de l’histoire prenant acte du structuralisme, le premier au moyen d’une archéologie du savoir, le second au moyen de la déconstruction. Ainsi se dessine au cours des années 1960 un dialogue à distance et même parfois direct, comme en atteste l’échange autour de la deuxième Méditation de Descartes. Pour le retranscrire, nous procèderons en trois temps. Dans un premier temps, nous introduirons à la l’élaboration par Foucault d’une philosophie de l’archive et de l’archéologie, depuis son mémoire sur Hegel jusqu’à la parution en 1969 de L’Archéologie du savoir. Dans un deuxième temps, nous présenterons la lecture critique que Derrida fit de l’Histoire de la folie, et la réponse que formula Foucault à cette critique. De là nous basculerons vers Derrida, et nous concentrerons sur trois points précis : l’importance de la question de l’histoire au prisme de L’Origine de la géométrie de Husserl, les premiers textes où se donne à voir la déconstruction (L’Écriture et la différence, De la grammatologie, parus en 1967), et enfin l’ouvrage de 1995 consacré à l’archive, Mal d’archive : une impression freudienne. Ces lectures croisées devront nous amener à considérer les questions suivantes : une approche historique du transcendantal est-elle possible ? Qu’est-ce qu’un a priori historique ? Peut-on étudier l’inconscient en histoire ? Quelle est la nouvelle tâche de la philosophie vis-à-vis des sciences historiques ?
REGRESSIONS – Marc CREPON
S1 – Mardi 10h30-12h30 - Résistants
« Régressions » est un cours de philosophie politique du moment présent. A l’encontre des philosophies de l’événement qui l comprennent ledit événement comme une disponibilité pour ce « qui vient », il analyse la façon dont ce qui définit notre présent est la hantise de ce qui revient : des formes de violence, dont on pensait légitimement que les avancées du droit (notamment du droit international, mais pas seulement) les excluaient. On s’interrogera donc sur quatre formes de « régressions » : la violation des règles du droit international (et les processus de légitimation de ces violations), la re-légitimation de la torture et des traitements inhumains et dégradants, les récritures et instrumentalisations de l’histoire, avec ce qu’elles comportent de révisionnisme et de négationnisme, l’offensive réactive du masculinisme et du sexisme. Chaque fois il s’agira d’analyser non seulement les dispositifs discursifs qui organisent cette régression, les outils dont ils disposent (les réseaux sociaux, l’intelligence artificielle), mais au moins autant les formes de consentement « au pire » qu’il génère. On tâchera de mesurer la façon dont notre temps articule une révolution technologique sans précédent (l’IA) et la pensée la plus régressive, ou plutôt dont il met la première au service de la seconde. On interrogera dès lors les voies d’une opposition et d’une résistance à ces « régressions ».
Les textes sollicités pour appuyer nos analyses seront empruntés à la philosophie contemporaine
Le Lysis de Platon - Dimitri EL MURR
S1 – Mercredi 10h-12h – Résistants
Après le Phèdre (2022-2023) et le Banquet (2024-2025), nous poursuivrons notre exploration des dialogues érotiques platoniciens en lisant cette année le Lysis. Longtemps considéré comme un « petit » dialogue influencé par l’éristique, le Lysis, dont le sujet déclaré est l’amitié (philia), a connu un regain d’intérêt dans les études platoniciennes ces 20 dernières années, sous l’impulsion notamment du commentaire détaillé qu’en ont donné T. Penner et C. Rowe (Plato’s Lysis, Cambridge University Press, 2005). Dans le sillage de ce commentaire foisonnant, il s’agira de redonner à ce dialogue toute sa complexité en en proposant une lecture suivie et en resituant l’ensemble dans son contexte plus large, tant en amont, en comprenant sa place dans la littérature présocratique et socratique consacrée à la philia, qu’en aval, en interrogeant son influence sur les traités aristotéliciens portant sur l’amitié aux livres VIII et IX de l’Éthique à Nicomaque et au livre VII de l’Éthique à Eudème.
La traduction recommandée est celle de L.-A. Dorion : Platon, Charmide-Lysis, Paris, GF-Flammarion.
Séminaire doctoral : lire l’Alcibiade de Platon – Dimitri EL MURR
S2– 9h30-12h et 16h-18h30 – Pasteur
Calendrier spécifique : 20, 21, 22, 23 et 24/04/2026
Held jointly by Dimitri El Murr (ENS-PSL) and Frisbee Sheffield (University of Cambridge), this research seminar for graduate students will be dedicated to reading Plato’s Alcibiades. Of tremendous importance in the long history of Platonism, this dialogue on self-knowledge, which Neoplatonic philosophers read notably as the perfect introduction to the Plato’s philosophy, does not play a crucial role in contemporary Platonic studies, certainly because its authenticity has been doubted. This research seminar will consist in reading the whole dialogue section by section. It will take place on 20th-24th April (every day of the week, 9.30-12.00 am and 4-6.30 pm).
Knowledge of English and ancient Greek are required. Active involvement of participants is also required.
Those interested should write to dimitri.el.murr@ens.psl.eu before mid-march 2026.
La métamorphose : approches littéraires et philosophiques dans l’Antiquité – Dimitri EL MURR et Jean TRINQUIER
S2 – 14h-16h - Salle séminaire DSA
Calendrier spécifique : 11 et 18 février, 18 mars, 1er et 8 avril, 6 mai 2026
Être métamorphosé en animal et renaître sous forme animale sont deux processus riches de virtualités à la fois narratives et philosophiques, qu’il convient d’étudier et de comparer. Le thème de la métamorphose, par la transgression des frontières entre l’homme et l’animal qu’il implique, permet avant tout, dans les textes de l’Antiquité, d’interroger la nature de l’homme dans son essentielle plasticité et instabilité. Nous nous intéresserons plus particulièrement aux mythes platoniciens, au Gryllos de Plutarque, à l’Âne d’or d’Apulée auxquels on ajoutera les Métamorphoses d’Ovide.
Validable dans le cadre du DENS et comme expérience transdisciplinaire
Hasard, probabilité et déterminisme dans les sciences naturelles – Mathilde ESCUDERO
S2- Lundi 16h-18h – Résistants
Qu’est-ce que le hasard ? S’agit-il du produit de l’ignorance des causes ? Ou d’une propriété réelle du monde qui existe indépendamment de la connaissance que l’on en a ? Si la science a vocation à prédire et expliquer, que peut-elle face à des évènements ou phénomènes aléatoires ?
Ce cours s’attachera à répondre à ces questions, en s’intéressant aux liens entre le hasard, la probabilité et le déterminisme, d’un point de vue métaphysique et épistémologique. Nous nous intéresserons aux usages de la notion de hasard dans les théories scientifiques, en portant une attention particulière aux sciences naturelles et notamment à la physique (physique classique, statistique et quantique). Ce sera aussi l’occasion de réfléchir à certains des problèmes majeurs de la philosophie des sciences, comme le problème des interprétations de la probabilité ou le problème de l’explication scientifique.
Frege et son héritage – Julien FARGES
S2 – Jeudi 18h-20h – Résistants
En mettant au point, à la fin du XIXe siècle, un nouvel outil d’analyse qui renouvelle le projet leibnizien d’une « caractéristique universelle », le logicien philosophe Gottlob Frege (1848-1925) s’impose d’abord comme le fondateur de la logique moderne. Plus généralement, la portée philosophique considérable de son œuvre (concernant la théorie de la connaissance, l’ontologie, la philosophie de l’esprit et la philosophie du langage) a pu lui valoir d’être considérée comme « une révolution en philosophie aussi importante que la révolution similaire accomplie par Descartes » (M. Dummett) – révolution dont est directement issu le vaste courant de la philosophie analytique, mais qui ne fut pas non plus sans effet sur l’autre œuvre philosophique inaugurale qui s’élabore au tournant du XXe siècle, la phénoménologie husserlienne.
Ce cours se propose un double objectif. Il se veut tout d’abord une introduction à la pensée de Frege, présentant ses thèses principales et ses élaborations théoriques majeures (le projet d’une idéographie, la redéfinition du concept en termes de fonction, la distinction entre concept et objet, entre sens (Sinn) et signification (Bedeutung), la redéfinition objectiviste de la pensée et des conditions de sa vérité). Mais il s’agira aussi d’interroger, chemin faisant, l’héritage de l’œuvre de Frege, en se penchant non seulement sur ses interactions avec la phénoménologie husserlienne (depuis la critique à laquelle Frege lui-même a soumis les premiers travaux philosophiques de Husserl jusqu’aux tentatives plus récentes d’une « lecture frégéenne de la phénoménologie »), mais aussi sur la façon dont elle irrigue le projet philosophique du jeune Carnap. La question sera posée, en fin de parcours, des ressources de la pensée frégéenne pour la discussion critique du relativisme de certaines pensées constructivistes contemporaines.
Actualité de la recherche phénoménologique - Julien FARGES, avec Dominique PRADELLE et Laurent PERREAU
Annuel – Vendredi 17h-19h – Salle Cavaillès
Calendrier spécifique : 10/10, 14/11, 12/12, 09/01, 06/02, 20/03, 20/05, 12/06
Chacune des séances de ce séminaire de recherche proposé par les Archives Husserl de Paris (UMR 8547) depuis plusieurs années consiste en la présentation, par son auteur(e), d’une publication récente dans le champ de la philosophie phénoménologique (monographie, traduction, édition), puis d’une discussion avec le public.
Destiné aux étudiants de Master, aux doctorants et aux chercheurs confirmés, ce séminaire organise ainsi, de séance en séance, une réception critique des travaux les plus récents au sein du mouvement phénoménologique.
Introduction à la sociologie historique comme pratique interdisciplinaire, Approche wébérienne - Alexis FONTBONNE, Paul SLAMA, avec Isabelle KALINOVSKI
Annuelle – Jeudi 13h30-16h30 - Sartre
Calendrier spécifique : 27/11, 4/12, 11/12, 18/12, 15/01, 22/01, 29/01, 05/02
Pour éviter que l’approche interdisciplinaire ne se réduise à un effet de mode, il est nécessaire de définir les conditions pratiques d’une mise en relation des différentes sciences : spécifiquement la collaboration entre l’histoire et la sociologie soulève un nombre important de difficultés qui appellent une analyse épistémologique et une réflexion sur les modalités d’application de celle-ci.
Le récent ouvrage d’Étienne Anheim et Paul Pasquali, Bourdieu et Panofsky, essai d’archéologie intellectuelle, illustre la manière dont l’élaboration conceptuelle en sociologie peut se fonder sur l’étude historique des périodes anciennes. Les huit séances de séminaire présentées ci-dessous, organisées par un philosophe et un historien spécialiste d’histoire religieuse du Moyen Âge, dans le cadre du laboratoire Pays germaniques et en collaboration avec la germaniste Isabelle Kalinowski, chercheront à fournir une méthode pour la construction de concepts opératoires et leur usage afin d’affiner les modèles de description des phénomènes historiques.
L’œuvre de Max Weber fournit une matrice conceptuelle et méthodologique essentielle à une compréhension sociale de ces phénomènes.
Programme des séances :
1) La sociologie historique, unité primitive des sciences sociales confrontée à l’autonomisation discursive des pratiques
2)Approche historique de la psychologie
3) La construction des notions : l’approche idéaltypique
4) La construction des notions : le comparatisme
5) Des agents au champ
6) Les formes de l’économie symbolique : de l’intrication au méta-champ
7) Retour à l’économique
8) Exposés d’étudiants.
Philosophie de la médecine et de la santé – Marie GAILLE
S2 – Mardi 14h-16h - Résistants
Ce cours a pour objectif de présenter les principaux jalons textuels, enjeux conceptuels et objets de la philosophe de la médecine et de la santé.
Il s’adresse à des étudiants sans pré-requis de connaissance sur le sujet.
Les textes qui y seront abordés seront essentiellement en français et en anglais, sans exclure des versions bilingues de textes dans d’autres langues, anciennes ou vivantes.
Série 1 : De la philosophie comme médecine à la philosophie de la médecine (séances 1 à 4). Dans une perspective d’histoire de la pensée et conceptuelle, seront abordés les différents positionnements philosophiques à l’égard de la médecine comme forme de connaissance et comme pratique, jusqu’à l’époque contemporaine où la philosophie déploie, selon M. Lemoine, trois angles pour aborder la médecine : épistémologique, anthropologique, éthique. Les figures de médecins-philosophes y feront l’objet d’une attention particulière.
Série 2 : philosophie de la médecine et de la santé – déplacements, frontières, approches mondialisées (séances 5 à 8). Sera abordée et discutée la différence avancée par certains philosophes entre la philosophie de la médecine et la philosophie de la santé, et seront envisagées les orientations majeures de cette dernière. Seront également traitées, selon une approche conceptuelle et critique, les notions de santé globale, santé mondiale, les enjeux de santé environnementale et les interfaces entre philosophie de l’environnement et de l’écologie et philosophie de la médecine et de la santé.
Série 3 : l’objet du soin (séances 9 à 12). Cette dernière séquence s’intéressera, sous un angle épistémologique, éthique et politique, et sans prétention à l’exhaustivité, à des « conditions » et des « situations » où le dialogue entre philosophie et médecine s’est particulièrement noué : au sujet des « maladies mentales », de l’interruption de la vie humaine, des états sans guérison possible, de la santé publiques et de ses objectifs.
Le normal et le pathologique : enjeux contemporains d’une frontière conceptuelle – Marie GAILLE
S2 – Jeudi 10h30-12h30 – Résistants
Ce séminaire de recherche a pour objectif de reprendre à nouveaux frais la distinction entre le normal et le pathologique telle qu’elle a été conceptualisée par Georges Canguilhem.
L’œuvre de G. Canguilhem et sa réception seront au cœur de la réflexion développée dans ce séminaire ainsi que des travaux d’épistémologie de la médecine et de philosophie éclairant le sens de la distinction entre normal et pathologique à la suite de G. Canguilhem.
Il reposera sur un fascicule de textes qui sera distribué lors de la 1ère séance, et qui permettra aux étudiantes de préparer en amont leur participation à des séquences de discussion au sein de chaque séance.
Les textes qui y seront abordés seront essentiellement en français et en anglais, sans exclure des versions bilingues de textes dans d’autres langues, anciennes ou vivantes.
Dans un 1er temps, il s’agira de présenter les apports de la pensée canguilhémienne du normal et du pathologique, et sa mise en débat, notamment dans sa réception anglophone et francophone des 60 dernières années (séance 1 à 6).
Puis, il s’agira d’analyser les éléments qui peuvent conduire aujourd’hui à proposer une réélaboration de la frontière entre normal et pathologique et examiner le sens et la portée de ces deux catégories, en nous intéressant notamment à la conceptualisation du handicap, du vieillissement, de la maladie chronique et enfin à la médecine prédictive.
Ce séminaire est ouvert à des étudiantes de master.
Séminaire doctoral – Philosophie allemande classique, Esthétique – Mildred GALLAND-SZYMKOWIAK et Gabrielle CHARRAK
Annuel – Mercredi 16h-18h – Résistants
Calendrier spécifique : 24 septembre, 8 octobre, 11 février, 1er avril, 15 avril, 13 mai
Le séminaire est composé de séances de travail animées par les doctorants travaillant sous la direction de M. Galland-Szymkowiak. Les thèmes abordés relèvent de la philosophie allemande classique (Schelling, Hegel) et/ou de l’esthétique/philosophie de l’art. Il ne s’agit pas d’un cours, mais de l’exposé et de la discussion de recherches en train de se faire, dans une atmosphère de collaboration bienveillante.
Ce séminaire est ouvert aux étudiants qui le souhaitent, après accord. Il n’est pas validable. Une participation active est requise, avec le cas échéant la lecture de textes philosophiques ou de papiers de recherche pour préparer la séance.
Actualité de la recherche sur la philosophie allemande classique – Mildred GALLAND-SZYMKOWIAK et Alexandru DAVID
Annuel – Mercredi 16h18h – Résistants
Calendrier spécifique : 1er octobre, 15 octobre, 10 décembre, 4 février, 18 février, 8 avril, 6 mai, 20 mai
La philosophie allemande classique embrasse les corpus composant le paysage intellectuel allemand de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle : non seulement Kant, Fichte, Schelling, Hegel, mais également les philosophies du premier romantisme allemand (Frühromantik) et d’autres plus inclassables comme Lessing ou Jacobi. Chaque séance du séminaire est centrée sur la présentation d’une publication récente relative à ce domaine, par un chercheur/une chercheuse français ou étranger. La conférence sur son livre, ou éventuellement son projet de recherche, est suivie d’une discussion collective. Ce séminaire de recherche (département de philosophie / UMR Pays germaniques) qui a lieu pour la 2e année est ouvert à tous. Il peut faire l’objet d’une validation (assiduité et compte-rendu d’une séance ; 3 ECTS).
Jacobi, David Hume sur la croyance, ou idéalisme et réalisme (1787) – Mildred GALLAND-SZYMKOWIAK, Orion CHATZIARGYROS
S2 – Mercredi 16h-18h – Résistants
Calendrier spécifique : 05-12-19/11, 03-17/12, 07-14-21-28/01, 11-18/03
+ Colles agrégatifs (calendrier à venir)
Le cours sera constitué par une étude du dialogue de Friedrich Heinrich Jacobi intitulé David Hume sur la croyance (1787). Il s’adresse prioritairement aux agrégatifs pour préparer l’épreuve orale de texte philosophique en allemand.
Mais il est ouvert à tous en raison de l’importance de Jacobi pour une culture philosophique approfondie. Jacobi est un protagoniste majeur et trop ignoré dans le développement de la séquence qui va de Lessing et Kant à Fichte, Hegel et Schelling. Il a adressé des critiques de fond aux projets philosophiques des idéalismes kantiens et postkantiens, et sans ses interventions (parfois polémiques), la philosophie allemande classique telle que nous la connaissons n’existerait pas. Avec Jacobi, qui dénie à la raison la capacité d’atteindre un en-dehors de soi (l’existence, Dieu, la liberté), se trouve requise une réélaboration du rationalisme. Quant au David Hume, qui paraît la même année que la 2e édition de la Critique de la raison pure et met en œuvre une critique du kantisme, il donne un essor décisif à la discussion sur le rapport d’exclusion ou d’intrication entre idéalisme et réalisme.
Une validation (6 ECTS) sera possible selon des modalités qui seront précisées pendant le cours.
Texte allemand :
JACOBI, David Hume über den Glauben oder Idealismus und Realismus. Ein Gespräch (1787),hrsg. von Oliver Koch, Hamburg, Meiner (Philosophische Bibliothek 719), 2019.
Traduction française :
Jacobi, David Hume et la croyance. Idéalisme et réalisme, trad. et introd. par Louis Guillermit, Paris, Vrin, 2000.
Outil : Jacobi-Wörterbuch online (https://jwo.saw-leipzig.de/)
Savoir du dehors : postcolonialismes et décolonialismes aujourd’hui - Anoush GANJIPOUR, Gildas SALMON, Elad LAPIDOT
Annuelle – Mensuel Mercredi 14h-17h - 54 bd Raspail 75006 Paris, salle AS 1-08
L’enjeu du séminaire sera de proposer une présentation, une contextualisation, et une relecture critique des principaux courants du postcolonialisme et du décolonialisme. Bien que ces deux termes se soient imposés comme des références incontournables à la fois dans le discours savant et dans le débat public, leur invocation se réduit bien souvent à une caricature, car ses principaux auteurs demeurent très mal connus, et leurs textes de référence peu ou pas traduits en France. Pour y remédier, le séminaire proposera une introduction aux théories de certains de ses principaux représentants.
Le premier objectif sera, à chaque fois, d’inscrire le geste de déconstruction de la rationalité européenne qu’ils proposent dans son contexte théorique mais aussi politique, afin d’aborder deux questions : d’où ces théoriciens parlent-ils ? à partir de quel(s) dehors articulent-ils leurs discours critiques ? En procédant à cette mise en perspective, le séminaire cherchera à évaluer l’apport de ces discours critiques à une philosophie et à des sciences sociales qui entendent rompre avec leurs impensés coloniaux ou européocentriques. Mais il s’agira aussi de pointer des limites, des apories, ou encore des implications politiques non explicitées de ces discours et de leur geste de déconstruction, précisément du point de vue des « dehors » dont ils se réclament.
Note : ce séminaire prend la suite de celui qui s’est tenu sous le même titre en 2024-2025, mais il en est indépendant et son contenu sera différent.
Concepts économiques antiques – Julie GIOVACCHINI, Juliette LEMAIRE
Annuel – Mercredi 10h30-12h30 – Pasteur
Calendrier spécifique : 24/09, 08-22/10, 05-19/11, 03-17/12 2025, 21/01, 04-18/02, 11-25/03 2026
L’objet de ce cours est d’aborder les concepts économiques antiques, principalement à partir des corpus aristotélicien (Politiques, Éthique à Nicomaque, Éthique à Eudème, L’Économique du pseudo-Aristote, Théophraste) et épicurien (essentiellement Philodème) ; seront également abordés Platon (Lois, République), et surtout Xénophon, avec lequel dialoguent constamment et Aristote, et Philodème. Nous aborderons ces corpus analytiquement mais aussi philologiquement, en examinant leur transmission, et les questions d’édition et de traduction qu’ils posent. Il s’agira d’étudier la manière dont certains philosophes de l’Antiquité en partant du sens usuel d’oikonomia, ont théorisé des concepts clé de l’économie, tels le marché, les échanges, la monnaie, ainsi que de ses dérèglements.
Après une comparaison du traité intitulé Économique, attribué à Aristote avec les textes de Platon (République, Lois, Politique) et de Xénophon (Économique et Mémorables), nous lirons les passages de l’Éthique à Nicomaque, de l’Éthique à Eudème et des Politiques dans lesquels Aristote examine les échanges et la monnaie en posant les bases conceptuelles d’un marché fondé sur la valeur d’usage et non pas sur la valeur d’échange, à travers notamment son analyse de la mauvaise chrématistique. Nous verrons ainsi que l’administration des biens ne se cantonne pas à la sphère de l’oikos, mais qu’elle concerne aussi la cité, polis. L’étude du traité de Philodème nous permettra de brosser le portrait du philosophe et de son rapport à l’oikonomia.
Le problème de la conscience chez Marx – Paul GUERPILLON
S2 – Mercredi 10h30-12h30 – Résistants
Du 11/02 au 20/05
Ce cours propose de mettre en lumière la transformation progressive du problème de la conscience dans l’œuvre de Marx, et de rendre raison d’un tel mouvement. Dans un dialogue constant avec Hegel et Feuerbach, la pensée de l’émancipation du jeune Marx se déploie encore dans le cadre d’une philosophie de la conscience, où l’enjeu principal consiste en la réappropriation de son essence aliénée. Or Marx rompt radicalement avec une telle perspective lorsque, notamment avec l’Idéologie allemande, il oppose aux philosophies de la conscience une philosophie de la vie ; la thèse célèbre selon laquelle « c’est la vie qui détermine la conscience » devra ainsi être expliquée, en essayant d’en mesurer exactement le sens et la portée. Dans ce nouveau cadre conceptuel, le problème de la conscience n’est pourtant pas dissout ; il est reconfiguré. À une genèse de l’aliénation qui garde la conscience pour fondement se substitue l’exigence de fonder une genèse de la conscience elle-même, en l’enracinant dans les conditions matérielles de la vie. Depuis cette perspective, il devient possible de constituer de nouveaux problèmes : 1) le problème politique de la construction de la conscience de classe, tel qu’il se ressaisit notamment dans les analyses historiques de Marx ; 2) le problème du fétichisme, tel qu’il émerge pour sa part de la critique marxienne de l’économie. Au sein de la tradition marxiste, l’ouvrage Histoire et conscience de classe de Lukács, auquel le dernier moment du cours sera consacré, a précisément pour enjeu d’articuler et d’approfondir conjointement ces deux nouvelles problématiques, en les projetant au fondement d’une philosophie dialectique de l’histoire.
Art, Création, Cognition – Claude IMBERT
S2 – Jeudi 16h-19h – Salle à venir
Calendrier spécifique : 21/01, 5 et 19/02, 5 et 19/03, 2 et 16/04, 7 et 14/05
Ce séminaire, validable pour le master PSL, comme séminaire libre, ou pour le diplôme de l’ENS, est aussi une initiation à la recherche ouverte à tous. On insistera particulièrement sur l’actualité de l’histoire de l’art et ses transformations. Comme l’an dernier, une place importante sera donnée aux expositions en cours visant l’art européen ou non européen. En tenant particulièrement compte de l’importance donnée à la scénographie de l’exposition et aux nouvelles techniques de mise en visibilité, seront invités les commissaires de ces expositions. Ce propos sera soutenu par l’actualité éditoriale en France et à l’étranger, monographies, catalogues, ainsi que la présentation de traductions essentielles. Architecture, design urbain, formes musicales, photographie sont à notre programme qui sera détaillé lors de la première séance.
Ce séminaire est validable par la présence aux séances complétée par la rédaction d’un mini-moire dont le thème est choisi au cours d’un entretien, en fonction du cursus de l’étudiant(e).
contact : claude.imbert@ens.fr
L’affaire Dreyfus dans la pensée scientifique française – Frédéric KECK
S2 – Jeudi 10h30-12h30 – Salle à venir
Calendrier spécifique : 4, 11, 18 décembre, 8, 15, 22, 29 janvier, 5, 12, 19 février, 12 et 19 mars
Ce cours vise à montrer comment l’affaire Dreyfus a profondément transformé la pensée française, c’est-à-dire le travail littéraire, scientifique et philosophique qui s’est effectué en France au vingtième siècle. Elle inaugure le vingtième siècle dans la vie intellectuelle française comme la Révolution française l’a fait pour le dix-neuvième siècle, au sens où ces siècles répètent la dramaturgie issue de ces événements et expérimentent les valeurs qui s’y sont affirmées en mobilisant des figures du « primitif ».
L’affaire Dreyfus montre aux intellectuels français – qui se constituent pour la première fois en classe sociale – ce qui se passe quand ce n’est pas une société toute entière qui revient à l’état primitif mais un individu singulier. Alfred Dreyfus est en effet ce citoyen moderne qui est projeté brutalement dans l’état d’un sujet colonisé, puisqu’il est envoyé au bagne sans preuve de culpabilité.
Confrontés à ce fait impensable dans le cadre anthropologique du dix-neuvième siècle, les textes publiés pendant l’affaire Dreyfus articulent trois figures du « primitif » : le traître (celui qui s’est exclu du collectif en s’alliant avec l’ennemi), la victime (celui que le collectif a exclu en bafouant ses propres règles au nom de l’intérêt supérieur du collectif) et la sentinelle (celui qui revient des limites du collectif pour porter les signes des menaces auquel il est exposé). La première définit le camp anti-dreyfusard, la deuxième et la troisième divisent le camp dreyfusard autour de la question suivante : la victime est-elle sacrifiée au nom d’un intérêt supérieur ou annonce-t-elle par sa résistance une forme de justice à venir ?
Dans la première partie du cours, j’étudierai les premiers acteurs de l’affaire Dreyfus à partir de leurs écrits. Je lirai donc les œuvres de Maurice Barrès, Fernand Brunetière, Charles Maurras, Emile Zola, Georges Clemenceau, Bernard Lazare, Jean Jaurès, Charles Péguy, Jean Psichari et Léon Blum. Pour chacun de ces auteurs, je montrerai comment il noue littérature et droit pour renverser la figure du traître en victime, mais aussi comment s’esquisse dans cette opération la figure de la sentinelle.
Dans la deuxième partie, j’étudierai l’impact de l’affaire Dreyfus sur l’activité scientifique de la première moitié du vingtième siècle, notamment dans les sciences sociales et les sciences de la vie. Je lirai ainsi les textes d’Emile Durkheim, Lucien Lévy-Bruhl, Marcel Mauss, Emile Duclaux, Elie Metchnikoff et Charles Nicolle. Il s’agira pour moi de tester l’hypothèse suivante : si l’affaire Dreyfus doit opérer une purge du « poison antisémite » dans la société française, comme le voulait Zola, comment comprendre la mémoire de cet événement sur le modèle de la vaccination ?
Dans la troisième partie, j’aborderai la pensée française dans la deuxième moitié du vingtième siècle, c’est-à-dire dans les conséquences de la Shoah, dont l’affaire Dreyfus fut considérée par beaucoup d’observateurs comme un signal d’alerte car elle révélait les effets de ce que Zola appelait le « virus antisémite » sans en fournir un vaccin suffisamment efficace. J’étudierai les œuvres de Raymond Aron, Jean-Paul Sartre, Claude Lévi-Strauss et René Girard.
Heidegger’s Holzwege – Ondra KVAPIL
Annuel – Mardi 10h30-12h30 – Pasteur
S1 - Heidegger’s Holzwege : Art, Science, and Modernity
The course aims to demonstrate what the so-called turn in Heidegger’s thought consists of and to raise the question of the place that Heidegger’s late work occupies in contemporary philosophy. For this purpose, we will devote two semesters to reading a seminal book from this period, which bears the difficult-to-translate title Holzwege—Off the Beaten Track or Chemins qui ne mènent nulle part—and which is composed of six thematically different but deeply interconnected texts from the turbulent and, for the author, highly problematic years 1936–1946. The first half of the first semester will be dedicated to a discussion of the famous—and famously difficult—essay The Origin of the Work of Art. We will examine why Heidegger is compelled to interrogate the essence of art in the first place and how, at the same time, he deepens, by reflecting on their historical character, the key concepts of world and truth from Being and Time and introduces new ones : those of earth and clearing. In the second part of the semester, we will focus on the lecture The Age of the World Picture that, in turn, discloses the essence of modern science to formulate the metaphysical foundations of modern age, and the inquiry Hegel’s Concept of Experience, in which the metaphysics of Hegel is presented as the pinnacle of modern thought. This allows us to grasp, among other things, what is implied in the concept of the history of being, which looms over these texts, and what Heidegger means by the overcoming of metaphysics. (Although the course will be held in English, it can also be validated in French or German.)
S2 - Heidegger’s Holzwege : Nihilism and Destiny of the West
In the second semester, devoted to a close reading of Heidegger’s Holzwege, we will focus on the texts from the end of the war and the months immediately following it : the lectures Nietzsche’s Word : “God is dead” and Why Poets ? as well as the essay Anaximander’s Saying. In the first, Heidegger speaks of the end of metaphysics and the nihilism that follows it ; in the second—in dialogue with the poets Rilke and Hölderlin—he reflects on the possibility of non-metaphysical thinking concealed in nihilism ; and in the third, he returns to the beginning of metaphysics and questions its conceptual foundations. Across these texts, he arrives at highly provocative claims : that Western history is the growing oblivion of being, and that in our era we are slowly reaching its peak ; that in the history so far, human beings have never truly been human, and that they might never be ; and finally, that it is human thought that sets history in motion and thus also shapes its future course. In this class, however, we will not merely reconstruct the arguments that lead Heidegger to these conclusions, but will also—in both semesters—read between the lines of his texts : we will develop his theses to their inevitable consequences and formulate the unspoken premises on which they stand. (Although the course further explores the reading from the previous semester, it is designed as a stand-alone class and can be validated separately – in English, French, or German.)
Anarchisme et post-anarchisme – Dominique LESTEL
S1 – Mardi 13h-16h - Sartre
On assimile souvent la pensée anarchiste à celle de quelques-uns de ses théoriciens principaux comme Proudhon, Stirner, Bakounine ou Kropotkine, mais c’est un courant de pensée beaucoup plus riche qui s’est renouvelé aux XXe et XXIe siècles et qui reste très dynamique. Ce cours veut caractériser ce qu’est l’anarchisme, en identifier les limites et les zones ambivalentes, évoquer les questions émergentes et réactiver l’intérêt pour un courant politique mal connu. Il montrera en particulier en quoi le mouvement libertarien américain contemporain (dit aussi anarcho-capitaliste) ne relève pas de l’anarchisme mais montre au contraire une forme extrême de néo-libéralisme.
Penser le vivant au XXIe siècle – Dominique LESTEL
S1 – Mardi 16h-19h - Sartre
La question du vivant est l’une des questions centrales du XXIe siècle. Le vivant ne peut plus être assimilé au biologique et une grande quantité d’artefacts prétendent à un tel statut comme certaines IA, une poignée de robots et quelques personnages numériques. Le phénomène n’est pas nouveau. Fétiches, idoles, poupées, marionnettes, peluches, personnages de fiction, statues diverses et même fantômes ont déjà été considérés comme ayant quelque chose du vivant. Comment penser le vivant pour prendre en compte l’ensemble de ses manifestations présentes, passées et futures ? Peut-on être plus vivant qu’un autre, n’être vivant que de temps en temps ou n’être vivant que pour certaines personnes et non pour d’autres ? Pour tenter de répondre à ces questions, on proposera une conception anarchiste du vivant, relationnelle, située et constructionniste. Penser le vivant, aujourd’hui, c’est aussi l’effondrement de la biodiversité, la multiplication des cyborgs et les symbioses contre nature – une expression à prendre dans tous les sens du terme en français. Face à la complexité et à la diversité du phénomène du vivant aujourd’hui, on peut se demander si la philosophie ne doit pas se transformer profondément pour se rendre capable de penser ce qui reste encore aux franges du pensable.
Oser le Multiversalisme – Dominique LESTEL
S1 – Mercredi 13h-16h – Pasteur
Le séminaire veut présenter et discuter le Multiversalisme - une perspective philosophique émergente qui place la science-fiction au centre de la démarche philosophique. Il cherche à penser d’autres mondes pour penser notre monde autrement. La philosophie multiversaliste pense le trait d’union qui lie science et fiction dans « science-fiction » selon une double orientation de la pensée, celui de la rationalité critique du « oui, mais » et celle de l’inventivité transductrice du « et si ». Un objectif central de Multiversalisme s’ancre dans le désir de féconder le monde en multipliant les façons de l’appréhender, en engageant les croisements culturels les plus perturbants et en suscitant les expérimentations existentielles les plus délicates. Le Multiversalisme considère que la philosophie innovera toujours, en se compromettant avec la fiction mais il ne faut surtout pas l’assimiler à un « métaversisme » parce qu’il ne vise pas à substituer un simulacre numérique à la perception du réel. Le Multiversalisme réactive des postures qu’on trouve déjà en philosophie quand Platon invente l’Atlantide, quand Lucrèce célèbre la pluralité des mondes, quand Lucien de Samosate voyage vers la lune ou quand Leibniz imagine un monde dans lequel César n’a pas franchi le Rubicon. Les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde, il faut en inventer beaucoup d’autres pour le transformer. A noter qu’un « manifeste » a été publié au Canada en 2025 et que le premier colloque international sur le Multiversalisme s’est tenu à Yokohama au Japon cette même année.
Avec Vincent Bontems, philosophe au Commissariat à l’Energie Atomique et professeur à Paris-Saclay
Séminaire doctoral – Dominique LESTEL
Annuel – Mercredi 16h30-18h30 – Sartre
Le séminaire doctoral est un séminaire de recherche qui a deux objectifs. Le premier est d’initier et d’aider les étudiants intéressés par une forme de philosophie à la fois tournée vers la spéculation audacieuse et une pratique du terrain pour penser des problèmes contemporains. Le second objectif est de suivre les étudiants engagés dans une thèse ou un mémoire de mastère dans la perspective du séminaire.
Le corps, l’autre, l’histoire : conceptualisations, usages et critiques de la phénoménologie – Jean-Claude MONOD
S2 – Mardi 16h-18h – Résistants
Ce cours s’attachera à trois élaborations philosophiques marquantes réalisées par la phénoménologie husserlienne et à la façon dont elles ont été prolongées mais aussi mises en question ou réorientées dans la pensée ultérieure du XXe siècle : 1) la distinction entre Körper et Leib, corps extérieur et corps vécu ; 2) la constitution d’autrui comme alter ego ; 3) l’histoire comme lieu d’apparition de vérités et d’énoncés capables d’une itération indéfinie et d’une progression à l’infini. Après être revenu sur les textes fondateurs de Husserl pour ces trois problèmes, on suivra plus particulièrement 1) les difficultés à assigner des frontières claires entre le « corps propre » ou la « chair » et le corps en tant qu’il est doté d’une étrangeté intrinsèque à sa participation aux processus vitaux comme à son inscription sociale ; 2) les problèmes que pose le geste qui appréhende autrui comme ‘autre moi’, au risque de passer à côté de ce qui le fait autre ; 3) les risques de simplification et d’idéalisme inhérents à une approche de l’histoire guidée par une téléologie de la Raison. La mise au jour de ces difficultés a parfois débouché sur un usage transformé et « critique » de la phénoménologie (de Merleau-Ponty et Levinas à l’actuelle « critical phenomenology »), parfois sur une sortie de la phénoménologie au profit d’autres approches de la socialisation du corps (la sociologie critique de Bourdieu, la pensée féministe d’I.M. Young) ou d’autres méthodes d’investigation de l’histoire des énoncés (Foucault) ou des transformations des horizons de sens (Blumenberg). Dans quelle mesure la phénoménologie résiste-t-elle aux critiques qui lui ont été adressées sur ces trois axes, et peut-elle encore irriguer la réflexion contemporaine ?
Nature et volonté dans la pensée politique moderne – Elena PARTENE
S2– Vendredi 14h-16h - Résistants
Calendrier spécifique : du 06/02 au 15/05
Ce cours portera sur la manière dont la philosophie politique moderne redéfinit, à partir du XVIIè siècle, le concept de nature. La tradition politique moderne rompt en effet avec le paradigme classique du droit naturel fondé sur un ordre normatif et téléologique du monde. Cette rupture (marquée par la promotion du droit naturel moderne, du concept de souveraineté et du paradigme du contrat) va poser le problème du rapport entre la nature et la volonté : y a-t-il des principes naturels du droit ou tout repose-t-il sur une métaphysique de la volonté ? Autrement dit, la nature est-elle muette quant à la loi ou bien la volonté qui l’institue peut-elle se référer à une norme a priori ?
Réflexions sur la mort. Une lecture de Sartre – Elizaveta PAVLENKOVA
S1 - Jeudi 18h-20h – Pasteur
En 1939, pendant son séjour à Marmoutier, Sartre a eu l’idée d’écrire les « Réflexions sur la mort ». Il a proposé cette idée à Jean Paulhan, rédacteur en chef de la NRF. L’idée n’a pas eu de suite. Le cours se proposera ainsi de conjoindre deux questions. Il s’agira, d’une part, de se demander ce que pourrait être ce texte et si cette étude doit être considérée comme l’exercice de la pensée ou comme son préalable. D’autre part, et plus profondément, il s’agira de questionner la liberté et la mort, ainsi que le sens qu’a la mort : pourquoi sommes-nous mortels ?
Ce cours proposera une lecture attentive des passages de L’Être et le néant qui portent sur les notions l’en-soi et le-pour-soi, l’être-pour-autrui, la liberté, le temps, la mort, l’être-pour-la-mort, etc. Les textes étudiés seront mis à la disposition des étudiants.
Bibliographie :
SARTRE, L’Être et le néant, 1943, Paris, Gallimard, « Tel », 1980.
Carnets de la drôle de guerre (1939-1940), Paris, Gallimard, 1995.
Les mots, 1963, Paris, Folio, 1964.
BIRAULT H., Le problème de la mort dans la philosophie de Sartre, Paris, Gallimard, 1981 (Idées, 438).
CREPON M., « Mourir pour ? La critique sartrienne de l’être-pour-la-mort », Studia Phaenomenologica 8, 2008, p. 109-119.
SCHUMACHER B., « La mort sous l’angle de la structure de l’être-pour-autrui », Les Études Phénoménologiques 33-34, 2001, p. 163-195.
VARET G., L’ontologie de Sartre, Paris, Puf, 1948.
Philosophie médiévale : esse, mens, Protonoè ; l’être et l’esprit chez Dante – Bruno PINCHARD
Annuel – Mardi 17h-20h – Salle à venir
Calendrier spécifique : 16/12, 20/01, 24/02, 24/03, 21/04, 26/05
Après les travaux sur le Joachimisme (2022) et sur la notion de forme substantielle à partir de Thomas d’Aquin (2023-2025), le séminaire cherchera à mieux définir le point de rupture qui libère le style propre de Dante, que celui-ci s’affirme dès la Vita nuova, lors de sa réécriture dans le Convivio ou, finalement, dans le passage entre le livre en prose inachevé et le poème accompli sous le titre de Commedia. Selon le choix effectué, c’est toute la perspective qui change et se transforme : soit confession multiforme, soit organisation conceptuelle en suspens, soit révélation pour des temps de métamorphose imminente. Il semble que ces alternatives ne soient pas étrangères à la question de l’être et de l’esprit dans leur rapport à la Protonoè, tels que Dante les inscrit au cœur du Convivio.
Atelier « Les archives de la philosophie » – Nathalie QUEYROUX et David DENECHAUD
Annuel – Lundi 16h-18h – Centre documentaire du CAPHÉS
Cet atelier se propose de sensibiliser les participant(e)s à la source « archives » en philosophie pour nourrir la recherche. Il s’agit avant tout d’un atelier pratique. Il comprendra une séance introductive concernant le cadre légal français relatif aux archives de la recherche, les catalogues et instruments de recherche ; des séances dédiées à un cas pratique avec la découverte, la manipulation, l’identification et la description archivistique de documents appartenant au fonds d’un philosophe ; enfin, des séances d’initiation au logiciel de reconnaissance d’écriture manuscrite Transkribus.
À l’issue de cet atelier, les participants seront à même de localiser des documents d’archives et mener des recherches dans des fonds de manière avertie et efficace.
Les 2 premières séances, à caractère plus théorique, sont proposées au 1er semestre (le 17 et le 24 novembre) ; les 10 suivantes, relevant de travaux pratiques, auront lieu au 2nd semestre et commenceront au début du 2nd semestre.
Nombre de places limité à réserver à l’adresse : bib-caphes@ens.psl.eu
La mathématisation de la nature et les Temps modernes – Sophie ROUX
S2 – Jeudi 8h30-10h30 – Pasteur
Calendrier spécifique : 5-12-19/02, 05-12-19-26/03, 2-9-16/04
Selon le Grand Récit des Temps modernes, la mathématisation de la nature qu’on trouve chez Galilée et Descartes aurait modifié aussi bien notre concept de nature que notre concept de science et plus généralement de connaissance. Ainsi, Cassirer caractérisait les sciences modernes par l’identité de la mathématique et de la nature en tant qu’elles sont fondées dans l’esprit humain, pour attribuer à Galilée la conviction de cette identité et à Descartes son explicitation systématique. De manière similaire, mais non identique, Husserl soutenait que, en substituant aux choses concrètes des idéaux mathématiques, Galilée avait ouvert la voie à une connaissance objective que Descartes aurait fondé métaphysiquement en distinguant res cogitans et res extensa.
Le cours « La mathématisation de la nature et les Temps modernes » se propose d’interroger ce Grand Récit, qui a été repris par Alexandre Koyré et par un certain nombre d’historiens des sciences. Est-ce que la mathématisation de la nature se dit de la même manière chez Galilée et chez Descartes ? Si la physique est la science mathématique par excellence, l’empire des mathématiques s’est-il étendu plus loin que la physique, en particulier jusqu’à l’étude des êtres vivants ? Et, si oui, sous quelle forme et avec quelles modalités ? Quels sont les arguments de ceux et de celles qui insistent sur les limites des mathématiques ? Y a-t-il, dans les savoirs de l’époque moderne, des usages plus pédestres, ou au contraire, plus sublimes, des mathématiques ? Et, avec tout cela, que penser de l’importation en philosophie du more geometrico ?
Le cours ne requiert pas de connaissance particulière en mathématiques, mais exigera qu’on lise une vingtaine de pages chaque semaine, qu’il s’agisse de textes primaires ou de littérature secondaire. S’il s’enracine dans le XVIIe siècle, il n’en aborde pas moins des questions philosophiques générales.
Expériences de pensée – Sophie ROUX, avec Carla Rita PALMERINO
S2 – Mercredi 14h-16h – Pasteur
Calendrier spécifique : 4-11-18-25/02,04-11-18-25/03, 1-8-15/04 et 06/05
La notion d’expérience de pensée a été très discutée ces dernières années, aussi bien en philosophie contemporaine qu’en philosophie des sciences. Tantôt il s’est agi de produire une démarcation entre usages légitimes et mésusages abusifs des expériences de pensée, tantôt d’examiner leur nature même. Qu’est-ce qui les rapproche et qu’est-ce qui les distingue des expériences au sens ordinaire ou des simulations ? Peut-on en tirer des conclusions justifiées ? Sont-elles de même nature en sciences et en philosophie ? Obéissent-elles toutes au même schéma général ?
Le cours « Expériences de pensée » se propose non seulement d’introduire à ces questions générales, mais d’examiner le fonctionnement des expériences de pensée qui ont été proposées par les philosophes modernes dans de multiples domaines – physique, cosmologie, métaphysique, éthique, politique, etc. Il s’intéressera aussi à l’histoire longue de certaines d’entre elles et interrogera leurs transformations de l’Antiquité à la période contemporaine.
Le cours est ouvert à tous ceux et à toutes celles, littéraires ou scientifiques, qui sont prêts à fournir un travail régulier. Il aura en effet lieu sous la forme d’un atelier de lecture, ce qui signifie que, les premières séances magistrales d’introduction passées, il faudra lire une vingtaine de pages chaque semaine, le cours consistant alors à discuter ensemble les textes en question pour en donner collectivement la meilleure analyse possible.
Jeudis de l’histoire et de la philosophie des sciences (JHPS) – Sophie ROUX, Stéphanie RUPHY, Maria PIA DONATO
S2 – Jeudi 16h-18h – Résistants
Les Jeudis de l’histoire et de la philosophie des sciences sont des conférences qui offrent aux étudiantes et étudiants littéraires et scientifiques un large panorama des recherches actuelles en histoire et philosophie des sciences, ces dernières étant entendues au sens large, de manière à aller jusqu’à la sociologie des sciences, à l’anthropologie des sciences, ou à certains aspects des sciences cognitives.
Pour chaque séance, le ou la conférencière invitée recommande un de ses articles récents, qui est posté sur le Moodle du séminaire pour que tous les participants et participantes puissent le lire à l’avance.
Le programme changeant chaque année, il est possible de suivre plusieurs années ce séminaire et d’acquérir ainsi une culture en histoire et philosophie des sciences, entendue au sens large.
L’évaluation repose sur l’assiduité, la participation à la discussion et un travail écrit sur une des séances qui est remis en fin de semestre.
Science, expertise et décision en démocratie – Stéphanie RUPHY
S1 – Mercredi 10h-12h – Salle à venir
Ce cours est accessible tout autant aux étudiants scientifiques que littéraires.
Le cours se propose d’interroger, du point de vue de la philosophie des sciences et de l’épistémologie sociale, la nature et le rôle de l’expertise scientifique dans nos sociétés démocratiques. La première partie du cours abordera les problématiques épistémologiques suivantes : dissensus, consensus et construction de l’expertise au sein des communautés scientifiques ; comment, et sous quelles conditions, la dépendance cognitive et la déférence aux experts d’un sujet connaissant sont-elles justifiées ? ; articulation entre savoirs scientifiques et savoirs profanes. La seconde partie du cours interrogera les différents rôles et responsabilités des chercheuses et chercheurs en tant qu’experts dans une démocratie : quelle articulation entre expertise scientifique et prise de décision politique ? L’engagement politique d’un expert peut-il être compatible avec des attendus en matière d’impartialité et de neutralité à l’égard de la science ?
La doctrine avicennienne de l’imagination et sa réception au XIIème siècle – Meryem SEBTI
Annuel – Mercredi 14h-16h – Sartre
Calendrier spécifique : 01-15/10, 05-19/11, 03-17/12, 07-21/01, 04-18/02, 04-18/03, 15/04, 06-27/05
Ce séminaire se propose d’étudier la manière dont la doctrine avicennienne de l’imagination a influencé deux grands penseurs du XIIᵉ siècle : al-Ghazālī (1058-1111) et Sohrawardī (1155-1191).
En 2023-2024, nous avons analysé la doctrine d’Avicenne à travers plusieurs textes fondamentaux du corpus avicennien.
Nous avons ainsi étudié le Traité de l’âme du Shifā’, dans lequel l’imagination s’inscrit dans une théorie générale de la perception. Nous avons également exploré le livre de la Météorologie du même Shifā’, où le philosophe traite des phénomènes optiques, tels que les halos et les arcs-en-ciel, à travers la notion d’image visuelle (shabaḥ).
Un autre aspect important que nous avons abordé concerne les liens entre imagination, prophétologie et la cosmologie qui sous-tend ces doctrines. Chez Avicenne, l’imagination exerce une fonction remarquable dans notre rapport au monde sensible.
Elle nous fait percevoir des phénomènes illusoires, comme les étoiles filantes, qui résultent d’une association erronée de deux formes distinctes. Cependant, sa fonction principale ne se limite pas à ces associations ou dissociations d’images mentales :
elle consiste surtout à produire une imitation (muḥākā, traduction arabe du concept grec de mimésis) des formes existantes.
L’imagination est ainsi centrale pour la compréhension avicennienne du processus cognitif. En 2024-2025, notre étude a porté sur trois textes majeurs d’al-Ghazālī. Nous avons étudié tout d’abord le Livre des merveilles du cœur, vingt-et-unième tome de son ouvrage majeur, la Revivification des sciences de la religion (Iḥyāʾ ʿulūm al-dīn). Nous avons également analysé le Kīmiyā-yi saʿādat (L’alchimie du bonheur) dans sa version originale persane, afin d’en saisir les nuances philosophiques et linguistiques propres. Enfin, nous avons abordé le Mishkāt al-anwār (La Niche des lumières), texte important de Ghazālī, qui a exercé une influence décisive sur Sohrawardī. Pour l’année 2025-2026, le séminaire portera sur l’œuvre de Sohrawardī, fondateur de la philosophie de l’illumination (ḥikmat al-ishrāq). Nous étudierons particulièrement le texte central de cette tradition philosophique, le Ḥikmat al-Ishrāq (La Philosophie de l’illumination) ainsi que le Partow Nāmeh (Livre du Rayonnement), rédigé en persan. L’étude de ces textes permettra de mieux comprendre comment la doctrine avicennienne de l’imagination a nourri une tradition intellectuelle novatrice au XIIᵉ siècle.
Ce séminaire offre aux étudiants une occasion d’approfondir leur maîtrise des textes classiques de philosophie arabe et persane.
Traduire le Traité de l’âme du Shifâ’ d’Avicenne T– Meryem SEBTI et Olga LIZZINI
Annuel – Samedi 9h-12h – Sartre
Calendrier spécifique : 11/10, 15/11, 13/12, 24/01, 14/03, 18/04 et 09/05
Dans son Traité de l’âme, sixième livre de la Physique de son Opus magnum le Livre de la guérison (Kitāb al-Šifā’), Ibn Sīnā (980-1037), connu par les latins sous le nom d’Avicenne, renouvelle en profondeur l’étude de l’âme humaine. Sa conception de l’âme infléchit radicalement la doctrine d’Aristote, selon laquelle l’âme et le corps forment une unité en acte par leur union indissociable concrètement. Selon le philosophe persan, étudier l’âme dans le cadre de la physique, c’est appréhender le vivant en tant qu’il est doté de mouvements, de perception, et dans certains cas de la capacité d’exercer une pensée rationnelle à l’aide de son intellect, c’est-à-dire, d’intelliger. Cette approche ne permet pas de savoir ce qu’est l’âme en elle-même ni de connaître son essence, puisque l’âme rationnelle, est une substance immatérielle et spirituelle dont l’étude relève de la métaphysique (et on a parlé en ce sens de métaphysique de l’âme rationnelle). Le Traité de l’âme du Šifā’ inaugure une synthèse nouvelle qui lit, à la lumière du néoplatonisme, la conception aristotélicienne de l’âme. Sa lecture a accompagné la (re)découverte du Peri Psychēs d’Aristote dont elle a profondément influencé la réception. L’ouvrage a été traduit en latin entre 1150-1152 et 1166 par Avendauth avec l’aide de Dominicus Gundissalinus, à Tolède, où il a été connu sous le nom de Liber de Anima seu Sextus de Naturalibus. La réception des œuvres de psychologie et de médecine d’Avicenne constitue un tournant majeur pour l’histoire de la doctrine de la connaissance dans le monde latin. Elle a pour effet que l’étude de l’âme est désormais replacée dans le cadre encyclopédique du corpus aristotélicien et que la noétique devient une partie intégrante de la physique. Cette réception a pour conséquence qu’au XIIIe siècle, Augustin, qui jusqu’au siècle précédent est l’autorité principale pour ce qui est de la doctrine de la connaissance, sera désormais confiné à la faculté de théologie alors qu’Aristote et Avicenne deviennent les figures centrales de la faculté des arts où l’étude de l’anatomie, de la psychologie et de la noétique sont dès lors indissociablement liées. Ils prennent également une place grandissante à la faculté de théologie.
Ce séminaire, inauguré en 2022/2023 (interrompu en 2024/2025), porte sur la traduction du Traité de l’âme du Shifâ’ d’Avicenne. Meryem Sebti (DR, CNRS) et Olga Lizzini (PU, Université Aix-Marseille) ont entrepris la traduction intégrale de ce texte. Ce séminaire offre aux étudiants l’opportunité de participer à ce travail en cours et de se familiariser avec les principes de la traduction des textes philosophiques arabes de l’époque classique.
Les mille plateaux de Deleuze et Guattari : une proposition pour la rénovation de la philosophie – Jonathan SHMILOVITZ
S1 – Lundi 16h-18h – Résistants
À l’occasion du centenaire de la naissance de Gilles Deleuze et du vingt-cinquième anniversaire de sa mort, ce séminaire propose de revisiter l’un de ses ouvrages majeurs, coécrit avec Félix Guattari : Mille Plateaux. Capitalisme et schizophrénie 2.
À une époque marquée par l’effondrement écologique, l’accélération technologique, la fragmentation politique et le retour des formes les plus inquiétantes de la machine de guerre, Mille Plateaux constitue non seulement un arsenal conceptuel contre les pensées réductrices (et la réduction même de la pensée), mais aussi une proposition radicale sur ce que peut devenir la pensée lorsqu’elle est forcée de passer à l’acte. Nous interrogerons la manière dont la forme expérimentale de l’ouvrage, ainsi que son engagement en faveur de la multiplicité, du devenir et de l’immanence, ouvrent la voie à une refonte de la philosophie comme force active – non plus gardienne de vérités universelles et intemporelles, mais puissance de déstabilisation, à l’écoute des forces contingentes, des devenirs minoritaires et des virtualités encore inouïes. Lire Mille Plateaux aujourd’hui, c’est ainsi repenser la vocation de la philosophie à travers ses rapports avec son histoire propre et avec ce qui lui est hétérogène : les sciences, l’art, les mathématiques, la psychanalyse, la technique, la politique et l’économie. C’est aussi une manière d’aborder les grands problèmes de notre époque tout en interrogeant les conditions mêmes de la pensée philosophique.
Le séminaire prendra la forme d’une lecture suivie de l’ouvrage et s’adresse à toutes celles et ceux – philosophes ou non – qui osent s’aventurer sur ces plateaux indomptés. La participation au séminaire suppose une présence active, la présentation d’un exposé oral, la lecture d’un nouveau plateau chaque semaine, ainsi que la rédaction d’un court mini-mémoire final.
Les pratiques et les usages de l’histoire au XXème siècle – Perrine SIMON-NAHUM
S2 – Mardi 10h30-12h30 – Résistants
L’histoire est devenue la grande question philosophique du XXème et du XXIème siècles. Elle n’est pas seulement abordée en tant que telle mais elle est le maillon indispensable pour affronter le problème de la modernité. On interrogera sur les pratiques de l’histoire aussi bien des philosophes que des historiens familiers de l’interrogation philosophique. On suivra dans ce cours comment l’histoire intervient dans la question de la temporalité et de l’événement (Rosenzweig, Benjamin, Taubes), du sujet et de l’interprétation (Ricoeur, Gadamer, Veyne), des structures ou de l’événement (Levi-Strauss, Foucault, Furet) de la civilisation (Cassirer, Elias), de la croyance et de la sécularisation (Weber, Löwith, Blumenberg), la guerre et la cité (Vernant, Vidal-Naquet), des traces et de la vérité (Derrida, Ginzburg), de la politique et de la responsabilité individuelle et collective (Jaspers, Arendt, Merleau-Ponty) ou de la liberté (Marx, Aron, Sartre, Snyder).
Philosopher sur les modèles de l’Intelligence Artificielle – Thomas SOUVERAIN
S1 – Lundi 14h-16h – Résistants
Ce cours porte deux ambitions : aboutir à une meilleure connaissance des modèles d’Intelligence Artificielle (IA) en tant qu’objets d’étude philosophique ; montrer que ces nouveaux objets statistiques prolongent ou renouvellent des questions philosophiques, entre sciences et techniques. Les séances s’articulent autour de trois concepts phares : explication, justice, création.
Les enseignements n’exigent pas de connaissances particulières en statistiques. En revanche, ils supposent une curiosité et une ouverture des étudiants quant aux nouveautés mathématiques et informatiques sans lesquelles nous ne pourrons rigoureusement parler d’IA, que nous allons donc introduire pour eux pas à pas. Dispensé en français, le cours nécessite une familiarité avec la lecture en anglais, nombre de ressources techniques et philosophiques sur l’IA étant anglophones. Pour suivre chaque séance de trois heures, il sera nécessaire aux étudiants d’assurer les lectures préalables, que nous reprendrons en séance dans le détail.
Après avoir brossé un panorama de l’histoire philosophique des automates, nous analyserons comment l’IA actualise les concepts épistémologiques clefs d’induction, et de modèle partant d’avancées à la frontière de la théorie et de l’ingénierie, en véhiculant des représentations du monde sous forme de « données » (data) – plus exactement de faits. Basculant du descriptif aux enjeux de valeurs, nous passerons les sorties de modèles d’IA au crible de l’approche rawlsienne de la justice comme équité. Nous étudierons, en particulier, les techniques de programmation actuelles visant à faire entrer les prédictions d’IA dans des canons de normes – distinction standard entre vertus, déontologie et conséquentialisme. Nous focalisant enfin sur l’IA générative, nous interrogerons la nouveauté des contenus au travers des notions de mensonge et de création. Naviguant au milieu de travaux récents de droit, informatique et sociologie, la dernière séance questionnera avec le moins de naïveté possible en quelle mesure les philosophes doivent, et peuvent, mobiliser l’interdisciplinarité pour se saisir de l’objet IA.
Epictète au miroir du néoplatonisme : la lecture du Manuel stoïcien par Simplicius – Stéphane TOULOUSE
S1 – Jeudi 16h-18h – Pasteur
Simplicius est un philosophe néoplatonicien de la toute fin de l’Antiquité (VIe siècle), élève du grand métaphysicien Damascius, et connu surtout en tant que commentateur d’Aristote. Pourtant, il a écrit un commentaire suivi au Manuel d’Épictète qui est resté longtemps ignoré des historiens de la philosophie antique. Pourquoi cet intérêt pour la philosophie stoïcienne ? A cette question s’ajoute le fait remarquable que, débordant largement l’interprétation éthique (théorique et pratique) des préceptes d’Épictète, autour de la notion stoïcienne des devoirs sociaux (kathêkonta), Simplicius livre à son lecteur des développements spéciaux sur des sujets moins attendus, tels que la question du mal, la nature des premiers principes, la providence et la justice divines, et questionne aussi la piété religieuse et le recours à la divination. On peut donc réfléchir avec Simplicius à des problèmes de métaphysique, de théodicée, et de philosophie religieuse. Que signifie ce mélange de commentaire et de digressions philosophiques spécifiques ? On peut faire l’hypothèse, avant de rentrer dans la lecture, qu’il s’agit d’un substantiel "testament académique", à portée propédeutique, du néoplatonisme finissant, quelques années après l’interdiction de l’enseignement de la philosophie à Athènes par l’Empereur chrétien Justinien (529).
Séminaire doctoral « La vie et la mort » – Frédéric WORMS avec Ondra KVAPIL et Jonathan SHMILOVITZ
S1 : le mardi de 18h-19h30 / S2 : le mercredi de 18h30-20h - Résistants
Il ne s’agira pas dans ce séminaire d’envisager « la vie et la mort » comme un problème intemporel ni comme un problème parmi d’autres, mais bien comme un carrefour critique de la philosophie contemporaine dans toutes ses dimensions : tout au long du XX° siècle mais aussi dans les débats les plus actuels, en métaphysique, mais aussi en éthique et en politique, source de tensions et d’oppositions mais aussi et par là même d’éclairages sur tous les autres problèmes de la philosophie (le temps, l’histoire, l’humain, le vivant et la planète par exemple). Le séminaire sera une construction collective avec les organisateurs mais aussi les participantes et participants, autour de questions et de travaux de recherche en cours, il comprendra un exposé suivi d’une discussion dans chaque séance. (Le cours peut être validé par les étudiant*e*s inscrit*e*s au Master en philosophie contemporaine.)